L'interview de Dyenn : quand Handicap et Pole Dance se rencontrent !

Après presque 4 mois de silence radio, un confinement et une crise sanitaire : le Blog reprend du service avec l'interview de Dyenn, une poleuse que j'ai découvert à travers son Instagram et que je trouve extraordinaire ! Elle fait preuve d'une motivation sans failles et nous transmet quotidiennement ses bonnes ondes. Elle nous prouve que malgré nos différences, avec de la volonté et de l’assiduité, tout est possible ! Découvrons en plus sur elle, son parcours sportif et sa vision de la Pole Dance !

Peux-tu te présenter ?
J'ai 29 ans (aïe ! Bientôt je passe le cap des 30 ! J'ai le temps, c'est en janvier), après avoir été plutôt citadine - Toulouse - j'ai posé mes bagages à Limoges où j'ai choisi d'y construire un morceau de ma vie. Je suis en couple, nous n'avons pas encore d'enfant ensemble mais il a une petite fille adorable. Quoi que, est-ce qu'on peut considérer deux chats, un chien et un lézard comme des enfants ? Je travaille dans les achats industriels, dans une grande entreprise française. J'ai un master dans les achats et je travaille depuis mes 21 ans... Le temps passe tellement vite, c'est impressionnant !
On peut clairement dire que j'ai quelques particularités : je suis une adepte du tatouages - j'ai une jambe complète, un dos complet, d'autres grosses pièces sur le reste du corps et très bientôt, un bras complet. Egalement, j'ai une malformation de naissance : le syndrome de poland. En effet, j'ai une main plus petite que l'autre et de ce même côté gauche, j'ai une absence complète du grand pectoral. Visiblement, ils ont oublié des morceaux lors de l'assemblage... Comme tu peux le voir, je n'en fais pas un complexe mais surtout, j'ai compris que c'est quelque chose qui me caractérise, qui fait partie intégrante de moi : c'est quelque chose que je ne changerai pour rien au monde ! J'ai une main que j'utilise normalement. Elle m'a donné la force de me dépasser et prouver à tous ceux qui en doutent que non, je ne peux pas faire comme eux : je peux faire MIEUX qu'eux ! 


Depuis combien de temps pratiques-tu la Pole Dance et qu'est ce qui t'a amené à ce sport ?
J'ai commencé il y a tout juste un an : en mai 2019, par le biais d'une copine. Elle en faisait, je trouvais ça superbe mais j'avais quelques peurs : je ne pourrais jamais y arriver, je ne suis ABSOLUMENT PAS - mais alors VRAIMENT VRAIMENT VRAIMENT VRAIMENT pas souple pour un clou !
Je n'ai jamais considéré mon handicap comme un frein. Je faisais à l'époque beaucoup de musculation.
Un jour, elle m'a proposé de venir avec elle et là : la découverte d'une nouvelle passion !
Au départ, je pensais que c'était juste ou plutôt "juste" un passe temps. Je ne me rendais pas vraiment compte du travail qu'il y avait derrière. Quand je voyais la prof qui faisait des figures avec tellement d'aisance, je pensais même que c'était "facile", erreur que j'ai compris très rapidement...

Quel était ton passé sportif et ta condition physique avant de commencer la Pole ?
J'avais commencé la musculation en 2014, un peu par hasard au départ (j'étais partie en Allemagne pour le travail quelques semaines, ne parlant pas un mot allemand, je me suis trouvée une occupation). Je peux dire que j'avais réussi à gagner du muscle, de la force et surtout j'avais réussi à développer une force mentale qui me permettait de suivre des programmes aussi bien sportif qu'alimentaire. Je n'avais pas peur de me lever à 5h30 pour aller à la salle avant d'enchaîner ma journée de travail... Mi 2018, j'ai eu deux opérations de la cage thoracique en rapport avec ma malformation de naissance qui m'a obligé à tout stopper. Petit à petit, j'ai repris les entraînements mais sans trop de motivation. J'avais besoin de changement.


A quelle fréquence pratiques-tu la Pole Dance ?
La découverte de la Pole m'a permis de retrouver cette envie et cette motivation de me dépasser !
Au départ, l'euphorie fait place à la douleur des bleus mais finalement la réussite de la figure tant attendue fait oublier les petites marques qui se créent sur nos cuisses. Maintenant, je n'ai plus de douleurs aux endroits habituels et les bleus n'existent plus non plus, heureusement d'ailleurs !
Il faut dire que quand j'aime, je ne compte pas. Dès la 3e séance, j'ai investi dans une barre pour l'installer à la maison. Dès que j'ai pu, j'ai pris l'abonnement illimité au studio et j'avais entre 2 et 3 cours de Pole par semaine, avec en complément un à trois cours de flexibilité / contorsion, un cours de chorégraphie et un cours de renforcement musculaire par semaine.
En parallèle, je continuais la musculation entre midi et deux, une à deux fois par semaine.
La période de confinement étant compliqué et le studio / la salle de sport fermés, j'avais pris le pli de m'entraîner au moins une heure après les cours de flexibilité et de renfo proposés par le studio, 5 fois par semaine. Par contre, il faut bien avouer que s'entraîner seule et s'entraîner avec les amies polesques n'a strictement rien avoir !
Il faut réussir à jongler entre les heures de cours, le travail dans lequel je n'ai pas d'heure de début ni de fin, les tâches quotidiennes, le repos et la vie de famille... Mais, j'aime avoir la vie bien remplie et, je pense que c'est une mission accomplie !

Quel rapport entretiens-tu avec ton corps ?
Il faut dire que j'ai la chance de savoir m'entourer de personnes extraordinaires. Mon conjoint me soutient dans tout ce que je fais, et ce même s'il me voit rentrer dans une état de fatigue avancé, des bleus pleins les jambes mais avec le sourire jusqu'aux oreilles ! J'ai également une professeur extraordinaire qui adapte certains mouvements qui me sont compliqués ou impossibles avec ma main, tout en faisant en sorte de me dépasser constamment pour que je puisse évoluer comme toutes les autres filles, et bien sur, il y a les filles de la Pole où une véritable amitié s'est crée.
Comme je l'ai déjà dit plus haut, je ne complexe pas par rapport à ma main ou encore à mon creux dans la poitrine. Je peux complexer pour mes cernes, pour mon acné, oui mais pas pour ce qui fait partie de moi. Si ça ne plait pas aux autres, je ne peux et je ne vais pas changer ce que je suis pour leur faire plaisir...


Selon toi, est-ce que la Pole Dance est un sport inclusif ou au contraire est-ce qu'il est difficile de s'y faire une place lorsqu'on est porteur de différences ?
Ce que j'ai tout de suite aimé au studio, c'est cette bienveillance parmi les filles : on commence toutes dans la même galère à ne pas savoir faire un tour sur une barre, à ne pas savoir s’asseoir sans lâcher un petit mot pas sympa car on a mal... Il y a des filles de tous âges, de toutes origines, de toutes morphologies et malgré tout, nous sommes là toutes ensembles pour s'entraider. En réalité, c'est bien ça qui est super : la pôle on pourrait croire que c'est un sport individuel mais en réalité, c'est un sport collectif bien plus qu'on ne le croit.
Comme beaucoup, en étant des filles, on a tendance à voir ce qui ne va pas chez soi : j'ai pris un peu de ventre, j'ai de la cellulite derrière les cuisses, ah zut je ne me suis pas épilée : qu'importe ! Il n'y a aucun jugement, et franchement, c'est ce qui nous manque un peu au quotidien. Ne plus avoir de rivalité et au contraire, avoir beaucoup d'amour et de bienveillance les unes vis à vis des autres. J'adore ! Tout le monde y est le/la bienvenu(e), sans prise de tête mais juste avec cette envie commune de passer des bons moments!

Tu as créé le hashtag #sjptp, que représente-t-il ?
#sjptp: si je peux, TU PEUX !  C'est ma philosophie que j’essaie de partager à travers ma page Instagram. Je veux dire par là que si moi, avec ma malformation de naissance, mes muscles manquants, j’arrive à faire du sport, avoir des résultats ou encore me créer la possibilité de faire tout ce dont j’ai envie, alors tout le monde peut aussi, toi y compris !
C’est un appel à la motivation, au partage de l’envie de faire ce que tout le monde pense impossible. Les seules barrières que nous avons sont celles que nous nous mettons.
Alors c’est parti !


Que peut-on te souhaiter pour la suite ? Quels sont tes futurs objectifs polesques ?
J'aimerai avoir la possibilité de travailler au maximum ma souplesse, quitte à trouver une professeur attitrée qui me ferait un programme sur mesure (la pauvre, il y a du boulot) ! Plus sérieusement, je voudrais progresser dans ce sport, arriver à gagner en muscle, en souplesse et en grâce (on ne peut vraiment pas dire que ça soit un mot qui me caractérise). Pour le reste ? J'espère aimer encore longtemps cette discipline et avoir envie de m’entraîner encore et encore !

 *clap de fin*

Je remercie Dyenn d'avoir accepté de répondre à toutes mes questions. La Pole Dance est un sport accessible à tous et qui s'adapte au handicap. Dyenn m'a d'ailleurs fait découvrir le compte de Deb Roach une poleuse amputé d'un membre supérieur et j'avais aussi été bluffée par le compte d'Andrew Gregory amputé au niveau d'un membre inférieur qui réalisent tous deux des figures absolument géniales ! Le handicap est loin d'être un frein dans la pratique de la Pole Dance alors nos complexes, notre manque de force ou de souplesse, le sont encore moins !

As-tu aimé cette interview ? Connaissais-tu Dyenn ou l'as-tu découvert à travers cet article ? Que penses-tu du rapport entre le handicap et la Pole Dance ?

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